L’exercice libéral de la puéricultrice, cadre réglementaire et perspectives d’évolution

24/02/2024

L'exercice libéral de la puéricultrice est un sujet particulièrement actuel. De nombreuses puéricultrices sont en projet d'installation ou en début d'activité, et les informations ou désinformations circulent abondamment. Avant d'initier les démarches administratives, il est essentiel de prendre connaissance du cadre réglementaire de l'exercice libéral infirmier et des impacts du conventionnement. Les obligations étant peu adaptées aux particularités liées aux missions propres des puéricultrices, plusieurs axes sont en cours de travail avec l'Ordre national des infirmiers. Viendront ensuite les négociations avec l'Assurance maladie et les syndicats d'infirmiers libéraux.

Mots clés : convention, déontologie, nomenclature générale des actes professionnels, puéricultrice libérale, réglementation, remboursement, statut


Ces dernières années, les infirmières puéricultrices sont de plus en plus nombreuses à développer une activité libérale, à temps plein ou en complément d'un poste salarié. Les raisons de ce choix d'exercice sont multiples : indépendance, rythme de travail, organisation du temps passé auprès des enfants et des familles, mais aussi insuffisance de l'offre de soins institutionnelle. En effet, la démographie médicale (médecins généralistes, pédiatres) est très hétérogène en France, globalement insuffisante sur le territoire [1], et de nombreuses familles ne trouvent pas de médecin pour assurer le suivi de leur enfant. Les services de protection maternelle et infantile (PMI), proposant le suivi médical des enfants de la naissance à 6 ans, mais aussi l'accompagnement à la parentalité à travers des consultations de puéricultrice (au centre ou à domicile) ou des actions collectives, touchent aujourd'hui seulement 13 % des familles [2] et font face à des contraintes financières, logistiques et humaines, limitant l'expansion de leur activité préventive. Les urgences, en particulier pédiatriques, sont donc "embolisées" par des admissions relevant non pas de motifs médicaux mais d'accompagnement en puériculture ou parentalité (pleurs, alimentation, sommeil…) [1]. Pour trouver des réponses à leurs questionnements, quels que soient le jour et l'heure, deux tiers des parents se dirigent vers les réseaux sociaux [3]. Si certains comptes, tenus par des professionnels de santé, proposent des contenus de qualité (vulgarisation médicale, éclairages sur le développement de l'enfant, etc.), la majorité contiennent des informations non vérifiées, erronées ou biaisées, voire dangereuses.

C'est dans ce contexte que l'exercice libéral de la puéricultrice prend son essor aujourd'hui, malgré plusieurs écueils.

Le cadre réglementaire


En l'absence de définition légale d'actes exclusifs à la spécialité de puéricultrice, l'exercice est régi par les mêmes textes réglementaires que celui d'une infirmière non spécialisée (encadré 1). Avant d'aborder les axes d'évolution actuellement travaillés avec l'Ordre national des infirmiers (ONI) ou en projet de négociation avec la Caisse nationale d'assurance maladie (Cnam), il convient de rappeler certaines de ces dispositions.

Le Code de déontologie des infirmiers [4], lui-même inscrit au Code de la santé publique (CSP) et dont une version commentée est accessible sur le site de l'ONI [5], décrit les devoirs des infirmiers envers les patients, les confrères et autres professionnels de santé, ainsi que les modalités d'exercice de la profession infirmière.

En effet, « Le mode d'exercice de l'infirmier est salarié ou libéral. Il peut également être mixte. » [6] Il est précisé que « La profession d'infirmier ne doit pas être pratiquée comme un commerce » [7].

Le Code de déontologie énonce également les modalités de remplacement ou de collaboration entre les infirmiers libéraux (Idel), ou encore leurs obligations en termes de locaux professionnels. Les activités de soins réalisées hors du cabinet ou du domicile du patient sont considérées comme relevant de l'exercice forain, or « L'exercice forain de la profession d'infirmier est interdit » [8]. Ainsi, tout Idel doit disposer d'un local professionnel répondant aux normes des établissements recevant du public, disposant d'une « installation adaptée et de moyens techniques pertinents pour assurer l'accueil, la bonne exécution des soins, la sécurité des patients ainsi que le respect du secret professionnel » [9], permettant une gestion des déchets issus de soins [10] et équipé d'un point d'eau. La salle d'attente est facultative, mais les patients doivent pouvoir être reçus dans des conditions correctes, respectant impérativement le secret professionnel. Le local peut être situé à l'adresse du domicile de l'infirmier s'il est indépendant de l'habitation et respecte les éléments énoncés.

C'est encore le Code de déontologie qui encadre la communication réalisée par les infirmiers pour faire connaître leur activité professionnelle libérale [11]. Un Idel peut par exemple « faire figurer dans les annuaires à usage du public, quel qu'en soit le support […] les modalités pour le joindre, les jours et heures de consultation ; [sa] situation vis-à-vis des organismes d'assurance maladie ; [ses] titres, diplômes et fonctions reconnus par le Conseil national de l'ordre » [12]. Toutefois, il lui est interdit « d'obtenir contre paiement, ou par tout autre moyen, un référencement numérique faisant apparaître de manière prioritaire l'information le concernant dans les résultats d'une recherche ». Dans cette même idée, « L'infirmier est libre de communiquer au public, par tout moyen, y compris sur un site internet, des informations de nature à contribuer au libre choix du praticien par le patient, relatives notamment à ses compétences et pratiques professionnelles, à son parcours professionnel et aux conditions de son exercice. Cette communication […] est loyale et honnête, ne fait pas appel à des témoignages de tiers, ne repose pas sur des comparaisons avec d'autres infirmiers ou établissements et n'incite pas à un recours inutile à des actes de prévention ou de soins » [13]. Il peut également « communiquer au public ou à des professionnels de santé, à des fins éducatives ou sanitaires, des informations scientifiquement étayées sur des questions relatives à sa discipline ou à des enjeux de santé publique. Il formule ces informations avec prudence et mesure, en respectant les obligations déontologiques, et se garde de présenter comme des données acquises des hypothèses non encore confirmées ». Le récit de parcours professionnel, le partage d'informations sur le développement de l'enfant, la parentalité, ou encore la vulgarisation médicale, mais aussi des actualités concernant l'évolution de la profession, sur un site internet ou des réseaux sociaux, représentent donc une vitrine dont les puéricultrices libérales peuvent se saisir.

Le Code de déontologie stipule en outre l'obligation d'affichage des principaux tarifs pratiqués et des modes de paiement acceptés dans les locaux professionnels et sur tout support présentant l'activité de l'infirmier au public, précisant que « Les honoraires de l'infirmier non conventionné doivent être fixés avec tact et mesure » [14]. Les ordonnances et autres documents professionnels comportent nécessairement des mentions comme le « numéro d'identification au répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé ou l'adhésion à une association agréée » [15]. L'infirmier peut également « faire figurer sur une plaque à son lieu d'exercice ses nom, prénoms, numéros de téléphone, jours et heures de consultation et sa situation vis-à-vis des organismes d'assurance maladie [ainsi que] ses titres, diplômes et fonctions reconnus par le Conseil national de l'ordre » [16]. Les éventuelles cartes de visite sont soumises aux mêmes autorisations et restrictions de mentions. L'infirmier est vigilant quant à la distribution de ces cartes de visite, ou encore de flyers, aux seuls patients qui en font la demande. Le fait de les laisser en libre distribution à l'extérieur du cabinet pourrait en effet être constitutif de concurrence déloyale et de pratique de la profession comme un commerce.

Enfin, le Code de déontologie encadre le cumul d'activités : « L'infirmier ne peut exercer en dehors d'activités de soins, de prévention, d'éducation à la santé, de formation, de recherche ou d'expertise, une autre activité lui permettant de tirer profit des compétences qui lui sont reconnues par la réglementation » [17].

La Convention nationale des infirmières et infirmiers libéraux [18] a été conclue en 2007 entre l'Union nationale des caisses d'assurance maladie (Uncam) et quatre organismes et syndicats d'infirmiers libéraux1 . Elle régit les droits et devoirs des Idel ayant choisi d'exercer sous convention avec la Sécurité sociale [19], et de la Sécurité sociale envers les Idel et leurs patients. Les puéricultrices exerçant sans conventionnement avec la Sécurité sociale restent donc soumises aux obligations relevant du Code de déontologie infirmier, notamment en termes de statut, de locaux ou de communication.

Parmi les avantages apportés par la Convention, le remboursement des soins est dû dans les quinze jours en cas de télétransmission, un forfait d'aide à la modernisation informatique (Fami) étant par ailleurs attribué sous conditions [20]. Le professionnel est couvert par le régime général de l'assurance maladie et de l'assurance maternité, et les charges sociales issues de l'activité de soins conventionnée sont en partie assumées par la Sécurité sociale.

Pour exercer sous convention, l'infirmier doit justifier d'une expérience professionnelle de 24 mois équivalent temps plein (ETP) dans une structure de soins supervisée ou coordonnée au cours des six années précédant son installation libérale. Cette durée est réduite à 18 mois ETP pour une activité de remplaçant. Le deuxième critère est le zonage géographique. En l'absence de convention spécifique, les puéricultrices sont soumises aux mêmes quotas démographiques que les infirmiers en soins généraux. L'installation est donc impossible, sauf dérogation de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM), en zone dite "sur-dotée" et favorisée par des aides financières [19] en zone sous-dotée (encadré 2).

La nomenclature générale des actes professionnels (NGAP) permet d'indiquer aux organismes d'Assurance maladie la valeur des actes tout en respectant le secret professionnel, les actes infirmiers étant désignés par une lettre clé et un coefficient. La NGAP est indispensable à l'activité quotidienne des Idel conventionnés avec l'Assurance maladie, qui s'engagent à respecter la tarification qui y est décrite. Une majoration "enfant de moins de 7 ans" (MIE) accorde 3,15 euros supplémentaires pour les soins à cette population, quelles que soient les qualifications de l'infirmier les réalisant. La télétransmission de la facturation est vivement encouragée, bien que non obligatoire.


Encadré 1 - Textes réglementaires de référence

Code de la santé publique (CSP)

  • Règles liées à l'exercice de la profession d'infirmier ou d'infirmière (articles R.4311-1 à R.4311-106) ;
  • Article R. 4311-13 relatif aux actes professionnels exercés en priorité par une puéricultrice ;
  • Code de déontologie des infirmiers (articles R.4312-1 à R.4312-9) : décret n°2016-1605 du 25 novembre 2016 ; décret n° 2020-1660 du 22 décembre 2020 portant modification du Code de déontologie des infirmiers et relatif notamment à leur communication professionnelle ;
  • Décret n° 2021-1131 du 30 août 2021 relatif aux assistants maternels et aux établissements d'accueil de jeunes enfants (article R.2324-39), instituant la fonction de référent santé et accueil inclusif. 

Code de la Sécurité sociale

  • Dispositions relatives aux infirmiers (article L162-12-2) : Convention nationale des infirmières et infirmiers libéraux. 
  • Nomenclature générale des actes professionnels (NGAP). 

Ordre national des infirmiers (ONI)

  • Code de déontologie des infirmiers commenté.
  • Recommandations aux infirmiers en matière d'information et de publicité. 

Les étapes administratives

Avant toute démarche visant à mettre en œuvre un projet d'exercice libéral, il convient de s'assurer d'être inscrit au tableau national de l'Ordre, d'être en règle de ses cotisations, et d'avoir connaissance de son numéro d'identification au Répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé (RPPS) [21].

L'adresse professionnelle devant être définie pour déposer une formalité de création d'entreprise sur le guichet unique de l'Institut national de la propriété intellectuelle (Inpi) [22], la première étape consiste à rechercher son lieu d'exercice. En cas de souhait d'installation conventionnée, c'est à ce moment également que l'approbation de la CPAM est requise (conditions d'expérience et zonage géographique). L'infirmière puéricultrice peut ensuite déposer son dossier et recevoir son immatriculation Siret de praticien et auxiliaire médical (PAM) ou de profession libérale en santé humaine (non conventionnée), liée à cette adresse professionnelle.

Les étapes suivantes sont la mise à jour de l'activité sur l'espace membres de l'ONI, ainsi que l'affiliation à la caisse de retraite (Carpimko pour les PAM, Carsat pour les autres).

Enfin, pas de début d'activité sans une assurance responsabilité civile professionnelle adéquate, cumulée à l'assurance du local et du véhicule professionnels (multirisques) ou souscrite séparément.

Facultative, l'adhésion à une association de gestion agréée (AGA) offre des avantages fiscaux et une ressource en termes de gestion de la comptabilité (formation, accompagnement, vérification). De même, la souscription de prévoyances invalidité/décès et complémentaires retraite est conseillée mais non obligatoire.

L'équipement en matériel informatique de télétransmission peut également être entrepris à tout moment. Pour bénéficier du Fami, mieux vaut s'équiper en début d'activité ou d'année civile.

Dans le cas particulier du maintien d'une activité salariée en parallèle, une demande d'autorisation de cumul d'activité doit être adressée à l'employeur avant toute autre démarche administrative.

Les freins à l'installation et au développement de l'activité

L'actuelle réglementation revêt de nombreux freins à l'exercice libéral de la puéricultrice au regard de ses champs d'activité.

Pour commencer, le conventionnement est souvent inaccessible. En effet, les établissements d'accueil du jeune enfant et la PMI, où exercent de nombreuses puéricultrices en projet d'installation libérale, ne correspondent pas à l'expérience attendue dans une structure de soins supervisée. Pourtant, si elles ne réalisent pas de soins infirmiers "techniques", elles y acquièrent une expérience de terrain particulièrement intéressante sur le volet de la prévention, de la promotion de la santé et de l'accompagnement parental.

Le partage du zonage infirmier provoque, quant à lui, un réel paradoxe dans l'offre de soins : une puéricultrice peut prendre une place d'infirmier sans nécessairement réaliser de soins aux adultes, pénalisant ainsi leur offre de soins, tandis qu'elle n'est pas autorisée à s'installer dans une zone sur-dotée en infirmiers qui n'effectuent pourtant pas tous des soins aux enfants, par manque de compétences ou d'expérience. In fine, c'est l'offre de soins aux enfants qui est la plus négativement impactée. Les puéricultrices libérales étant peu nombreuses par rapport aux infirmiers en soins généraux, les parents peinent à trouver un Idel compétent pour soigner leur enfant.

Par ailleurs, les conditions de l'exercice libéral requises par le Code de déontologie ne sont pas adaptées aux activités spécifiques des infirmières puéricultrices, en particulier celles de Référent santé et accueil inclusif (RSAI). De fait, ces missions s'exerçant au sein même des modes d'accueil, l'obligation de disposer d'un local professionnel est un non-sens.

De même, bien que la communication autorisée par le Code de déontologie soit assez large, elle reste plus restreinte que ce que pratiquent les "accompagnantes parentales" et autres coachs en parentalité, ce qui peut, de prime abord, faire craindre quant au développement de l'activité. Pour ces raisons, entre autres, certaines puéricultrices font le choix de l'auto-entreprenariat. Toutefois, si celui-ci est alléchant en termes d'obligations comptables, fiscales et administratives, il est assimilé à un statut commercial et ne constitue donc pas une option possible pour exercer de façon indépendante la profession de puéricultrice et ce, quelles que soient les activités (soins, accompagnement parental, ateliers, RSAI, etc.).

La question de la représentativité de ce mode d'exercice est cruciale. C'est par le nombre de professionnelles libérales respectant le cadre réglementaire que les textes pourront évoluer. Malheureusement, le suivi démographique systématisé est actuellement impossible : l'inscription au tableau de l'Ordre est obligatoire, mais l'activité de puéricultrice libérale n'y est pas recensée. Aux yeux de l'ONI, les puéricultrices ont donc des activités d'infirmières libérales non spécialisées.

Si la population adulte a facilement recours à un Idel pour des soins à domicile ou au cabinet, le réflexe est bien moins présent concernant les enfants, encore moins celui de rechercher un infirmier spécialisé (et alors même que la communication en la matière n'est pas aisée). En l'absence de nomenclature pédiatrique ou de puéricultrice, et d'actes exclusifs à la spécialité, la cotation des actes de soins et leur rémunération sont identiques entre puéricultrices et infirmiers en soins généraux. Pire encore, aucune condition d'expérience pédiatrique préalable n'est requise pour prendre en soin un enfant en secteur libéral. En d'autres termes, des puéricultrices (expertes de la santé de l'enfant) ayant exercé en secteur extrahospitalier pendant quelques années ne peuvent prétendre au conventionnement avec l'Assurance maladie, tandis que des infirmiers en soins généraux n'ayant reçu aucun enseignement ni effectué aucun stage en pédiatrie peuvent réaliser les soins infirmiers pédiatriques les plus techniques, y compris sur des nouveau-nés ou nourrissons.

Au-delà des contraintes administratives, les puéricultrices ont donc à effectuer un énorme travail de sensibilisation et d'information sur leur profession, tant sur le terrain auprès des parents que dans les plus hautes sphères des partenaires institutionnels.

La question du conventionnement est très prégnante malgré l'absence de remboursement d'actes spécifiques tels que l'accompagnement à la parentalité ou la consultation de puéricultrice [27]. Rappelons que ce conventionnement impacte la couverture maladie et maternité de l'infirmier, mais aussi les charges sociales, notamment à travers l'affiliation à une caisse de retraite différente. Pour les puéricultrices libérales non conventionnées, cette affiliation peu commune peut alors relever du parcours du combattant [28].

Enfin, tout exercice libéral revêt son lot de défis au long cours. Il s'agit de gérer une entreprise individuelle, avec ce qu'elle apporte de liberté d'organisation, de multiplicité des activités, de satisfaction personnelle, mais aussi de charge mentale, de comptabilité, de formalités administratives, etc.


Encadré 2 - Des aides à l'installation
L'Aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise (Acre) est un dispositif d'exonération de cotisations sociales pour la première année d'activité, accordé par l'Urssaf sous conditions [23].
Des contrats tripartites (Idel, CPAM et agence régionale de santé, ARS) d'aide à l'installation libérale en zone sous-dotée ou très sous-dotée permettent de percevoir une aide forfaitaire annuelle importante : le contrat d'aide à l'installation infirmier (CAII), le contrat d'aide à la première installation infirmier (Capii) et le contrat d'aide au maintien infirmier (Cami).
Les courtiers en assurances, les experts comptables (indépendants ou au sein d'AGA), ou encore les juristes (comme ceux du service juridique de l'ONI) représentent une ressource non négligeable dans le parcours d'installation et d'exercice.
À l'instar de ce qui est proposé aux parents pour les accompagner dans leur parentalité, les groupes d'échange entre pairs sont un soutien indéniable pour les puéricultrices en projet ou en cours d'installation libérale : commission des puéricultrices de ville [24] et Workplace [25] de l'Association nationale des puéricultrices(teurs) diplômé(e)s et des étudiant(e)s (ANPDE), "Café des puéricultrices" de l'association APILP – Accompagnement personnalisé à l'installation libérale des puéricultrices [26], rencontres locales, groupes dédiés au sein de réseaux sociaux grand public, etc.
Enfin, les réseaux pluriprofessionnels sont essentiels : dispositifs spécifiques régionaux en périnatalité (DSRP), communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), maisons de santé pluridisciplinaires (MSP), etc.


Perspectives d'évolution

La commission des puéricultrices de ville de l'ANPDE a sollicité, en vain, la mise en place d'un groupe de travail avec le Conseil national de l'Ordre infirmier et ses juristes afin d'identifier en détail les modalités d'installation et d'activité libérale pour les puéricultrices, au regard des textes réglementaires. Les conclusions avaient vocation à être diffusées à l'ensemble des conseils départementaux et régionaux, pour que cessent les disparités territoriales de traitement des demandes d'information ou d'accompagnement des puéricultrices. Les récentes réunions ont malheureusement été très décevantes sur ce point, et l'affaire n'évoluera plus jusqu'aux prochaines élections nationales.

Une autre revendication des puéricultrices de terrain, portée par l'ANPDE et l'ensemble des instances représentatives de la profession, est l'élaboration d'une nomenclature spécifique. Celle-ci prendrait en compte les besoins particuliers des enfants à travers une valorisation des compétences, du temps et du matériel supplémentaires qui sont nécessaires. Elle compterait des actes exclusifs aux puéricultrices (vaccinations, prescriptions…) et créerait une cotation pour la consultation de puéricultrice, en lien avec la très attendue réingénierie de la formation et son inscription dans le système universitaire licence-master-doctorat (LMD) [29]. Sur le versant de l'accompagnement à la parentalité, elle pourrait comprendre des séances individuelles et collectives, sous forme de forfait, par exemple.

Cette nomenclature pourrait s'envisager sous une convention propre aux puéricultrices, avec des conditions d'éligibilité adaptées. Une reconnaissance de l'expérience extrahospitalière pour les consultations et l'accompagnement à la parentalité pourrait alors être envisagée (l'accès au conventionnement en sortie de formation initiale, sans expérience, reste non souhaitable), ainsi que des dérogations à l'exercice forain pour les activités relevant du RSAI. Le zonage pourrait également être dissocié de celui des Idel.

Pour cela, un référencement fiable des puéricultrices libérales est nécessaire : les négociations à ce sujet sont également en cours avec l'ONI.

Conclusion

Comme tout entreprenariat, l'exercice libéral de la puéricultrice représente un investissement personnel important. La solidarité entre consœurs et le partage d'expériences sont des forces.

Le respect du cadre réglementaire défini par le Code de déontologie des infirmiers légitime les compétences de la puéricultrice et augmente la visibilité de la profession. La signature de la Convention nationale des infirmiers impacte le remboursement des actes issus de soins, la couverture maladie du professionnel, certaines charges sociales, mais pas le vaste champ des activités que l'infirmière puéricultrice libérale peut exercer.

Les puéricultrices, conventionnées ou non, ont toute leur place dans l'offre de soins libérale. Elles doivent le savoir et le faire savoir. Le développement d'exercice coordonné ou en réseau local impulse une dynamique pluriprofessionnelle essentielle.

Les évolutions attendues visent principalement à identifier et à valoriser les compétences supplémentaires des puéricultrices, actuellement restreintes à un statut et à des cotations identiques à ceux des infirmiers non spécialisés, et à reconnaître des modalités d'exercice particulières en lien avec les missions qui leur sont propres.

Avant toute démarche, il convient de s'assurer d'être inscrit au tableau national de l'Ordre, d'être en règle de ses cotisations et d'avoir connaissance de son numéro d'identification au Répertoire partagé des professionnels intervenant dans le système de santé (RPPS).


Citer :
Ledon E. L'exercice libéral de la puéricultrice, cadre réglementaire et perspectives d'évolution. Cahiers de la puéricultrice 2024 ; 374 : 12-17


Références

[1] Inspection générale des affaires sociales (Igas). La pédiatrie et l'organisation des soins de santé de l'enfant en France. Rapport, 2021. www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/2020-074r.pdf.
[2] Peyron M. Pour sauver la PMI, agissons maintenant ! Rapport, 2019. https://sante.gouv.fr/IMG/pdf/2018-102r-pmi.pdf.
[3] Cyrulnik B., et al. Les 1000 premiers jours, là où tout commence Rapport, 2021 ;
[4] Décret n° 2016-1605 du 25 novembre 2016. Articles R. 4312-1 et suivants du CSP. #LEGISCTA000033496885.
[5] Ordre national des infirmiers (ONI). Code de déontologie des infirmiers version commentée. CodeDeontologieCommente-01.10.2021.pdf.
[6] Code de déontologie des infirmiers. Article 59. LEGISCTA000006178629/.
[7] Code de déontologie des infirmiers. Article 76. LEGISCTA000006178629/.
[8] Code de déontologie des infirmiers. Article 75. LEGISCTA000006178629/.
[9] Code de déontologie des infirmiers. Article 67. LEGISCTA000006178629/.
[10] Code de déontologie des infirmiers. Article 37. LEGISCTA000006178629/.
[11] Décret n° 2020-1660 du 22 décembre 2020 portant modification du code de déontologie des infirmiers et relatif notamment à leur communication professionnelle, JORFTEXT000042731015.
[12] Code de déontologie des infirmiers. Article 69. LEGISCTA000006178629/.
[13] Code de déontologie des infirmiers. Article 68-1. LEGISCTA000006178629/.
[14] Code de déontologie des infirmiers. Article 80. LEGISCTA000006178629/.
[15] Code de déontologie des infirmiers. Article 56. LEGISCTA000006178629/.
[16] Code de déontologie des infirmiers. Article 70. LEGISCTA000006178629/.
[17] Code de déontologie des infirmiers. Article 55. LEGISCTA000006178629/.
[18] Avenant n° 6 à la convention nationale organisant les rapports entre les infirmiers et l'assurance maladie signée le 22 juin 2007. Convention%20infirmiers%20consolid%C3%A9e%20avenant%2010%20IDEL.pdf.
[19] L'Assurance maladie. Installation : le conventionnement et les aides. 2022. www.ameli.fr/infirmier/exercice-liberal/vie-cabinet/ins tallation-liberal/processus-installation.
[20] L'Assurance maladie. Le forfait d'aide à la modernisation et informatisation du cabinet professionnel. 2024. www.ameli.fr/infirmier/exercice-liberal/vie-cabinet/for fait-d-aide-la-modernisation-et-informatisation-du-cabi net-professionnel.
[21] Agence du numérique en santé. repertoire-rpps.
[22] Institut national de la propriété intellectuelle. Portail e-procédures - Guichet unique. procedures.inpi.fr/.
[23] Urssaf. L'Acre. accre.html.
[24] ANPDE. Les commissions thématiques. www.anpde.asso.fr/commissions
[25] Réseau social réservé aux adhérents. 
[26] www.apilp.fr
[27] Alonso P., Ledon E. La consultation de puéricultrice en période périnatale Les cahiers de la puéricultrice 2023 ; 368 : 24-26 
[28] Dufourg-Sanchez M. S'installer en tant que puéricultrice libérale non conventionnée, un fardeau ou un cadeau ? Les cahiers de la puéricultrice 2024 ; 374 : 24-27
[29] Alonso P. Réenchanter la profession comme promesse électorale - Un mirage ! Communiqué de l'ANPDE, octobre 2023. www.anpde.asso.fr/actu/mirage. 

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